La microcirculation : une cause possible de l'hypertension artérielle
L'étude a été menée chez des patients traités pour un cancer du côlon recevant un traitement anti-angiogénique
Bernard Lévy, directeur de l'Unité Inserm 689 (- Centre de recherche cardiovasculaire Inserm Lariboisière -) et ses collaborateurs de l'Hôpital Avicenne à Bobigny (Pr. Mourad et Dr des Guetz) viennent, grâce à une approche de recherche originale, de faire une avancée dans la compréhension de la physiopathologie de l'hypertension artérielle. C'est effectivement en étudiant les effets secondaires d'un traitement contre le cancer du côlon, que les chercheurs ont mis en évidence l'impact de la microcirculation sur l'hypertension. Ces travaux sont publiés dans les Annals of Oncology
Chez les patients atteints d'hypertension artérielle, on a constaté depuis longtemps une diminution de la densité des microvaisseaux (artérioles et capillaires) qui assurent la perfusion des différents organes. Cette observation est particulièrement importante dans le coeur, le cerveau et les reins, - organes cibles - les plus souvent atteints par les complications de la maladie hypertensive. Bien que la raréfaction de la microcirculation soit maintenant avérée, les scientifiques ignorent s'il s'agit d'une cause ou d'une conséquence de l'hypertension. Des résultats obtenus récemment permettent de porter un nouvel éclairage sur ce problème :
De nouveaux médicaments qui s'opposent aux facteurs de croissance vasculaire ont été introduits dans le traitement de certains cancers (côlon, rein). Le principe consiste à asphyxier une tumeur par un médicament qui empêche la croissance et le développement des vaisseaux qui irriguent cette tumeur. Ces médicaments bloquent les effets du principal facteur de croissance vasculaire, le VEGF (vascular endothelial growth factor). Cette nouvelle classe thérapeutique a apporté depuis 4 ans des résultats intéressants et un nouvel espoir dans le traitement des cancers.
L'évolution et la survie des patients bénéficiant de ces nouveaux traitements dits - antiangiogéniques - sont significativement améliorées. Cependant, on observe chez près d'un malade sur trois une hypertension artérielle qui peut, dans certains cas, obliger à l'arrêt du traitement.
- Nous disposions là d'une occasion unique de vérifier nos travaux menés chez l'animal- explique Bernard Levy. - Sachant que ces traitements entraînent une raréfaction de la microcirculation au niveau de la tumeur, nous avons voulu savoir s'ils pouvaient altérer les microvaisseaux des tissus sains, et donc déclencher l'augmentation de la pression artérielle.
- En rapprochant ces faits cliniques récents et leur expérience sur la microcirculation du patient hypertendu, les chercheurs de l'Inserm ont pu montrer, dans une petite série de patients atteints de cancer du côlon et recevant un traitement anti-angiogenique (bevacizumab), que :
-Tous les patients augmentent leur pression artérielle au cours du traitement ; certains doivent recevoir un traitement supplémentaire contre l'hypertension artérielle, d'autres restent à des niveaux de pression - acceptables - qui reviendront à la normale lorsque le traitement anti-angiogénique sera arrêté.
- On observe au niveau de la peau une diminution du nombre de capillaires qui semble liée à la dose de médicament reçue et à l'augmentation parallèle de la pression artérielle. - Enfin, des anomalies de la fonction endothéliale sont provoquées par le traitement anti-angiogénique et participent à l'augmentation du risque cardiovasculaire. Chez ces patients, la microcirculation semble donc bien être une cause de l'hypertension.
- Au-delà d'une meilleure compréhension et donc d'une meilleure approche thérapeutique des effets secondaires de ces nouveaux traitements du cancer, nos résultats apportent un éclairage nouveau dans la physiopathologie de l'hypertension artérielle et dans la prévention de ses complications - conclut Bernard Levy.
L'hypertension artérielle est le facteur de risque principal des accidents vasculaires cérébraux et des infarctus du myocarde, eux-mêmes première cause de mortalité dans les pays développés mais aussi dans les pays du Sud.
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